Comment sera 2006 ?
Un peu trop tôt pour le dire. Pour l’instant, on ne peut que se réjouir de la qualité: de beaux raisins, sains et goûteux. Nous sommes contents d’être parvenus à "faire l’appellation", ce qui signifie que la quantité de récolte atteind le quota fixé pour 2006. Ce n’était pas gagné, mais c’est fait ! C’est un point positif pour l’équilibre financier délicat de notre structure.
On pourrait développer d’avantage le point qualitatif en citant les très bons pH (3,05 à 3,09) ou encore les acidités ou les degrés, mais je ne pense pas que ça parle au visiteur de ce blog. Je laisse donc tomber.
Je tiens à remercier encore nos vendangeurs pour leur coup de sécateur précis lorsqu’il était nécessaire de "trier le bon grain de l’ivraie" lorsqu’il y avait du botrytis. En étant au pressoir, j’ai pu constater le contenu de chaque caisse en versant les raisins avec précaution. Rien ne nous échappe sur la qualité du travail des coupeurs à ce poste.
Parlons un peu du pressurage…
Pendant que je parle du pressoir, je peux exprimer ma satisfaction de travailler avec un pressoir très qualitatif. Depuis 2001, il nous montre sa capacité à s’adapter à la qualité des raisins.
Quelques explications préalables: si on regarde un raisin en coupe, il y a de l’extérieur vers l’intérieur:
– la peau du raisin,
– de la pulpe (difficile à pressurer)
– la partie juteuse de la baie amprisonnée dans des cellules qui écatent à faible pression
– de la pulpe (difficile à pressurer)
– les pépins (au centre)
Un pressurage Champenois de qualité consiste à extraire le jus des cellules qui éclatent à faible pression sans extraire le jus de la pulpe… plus facile à dire qu’à faire, non ? C’est à cette condition qu’on obtient des jus d’une grande finesse et d’un beau potentiel de garde. Les jus de la pulpe sont plus grossiers, plus chargés en éléments minéraux et de moins bonne garde. Les deux jus sont intéressants; mais pas pour les mêmes raisons. On peut les associer pour l’élaboration du champagne. Comme pour tout assemblage, les pourcentages de chacun sont variables selon l’année et selon le vin que l’on souhaite obtenir… d’où la nécessité de bien les scinder lors du pressurage !
Pourquoi suis-je content de notre pressoir ?
Il faut savoir que selon le climat de l’année, le cépage, la charge de la vigne ou encore l’avancement de la maturité, le raisin se pressure pas de la même manière. Par exemple, si la peau de la baie est dure, la pression qui s’applique sur les raisins montera assez rapidement jusqu’à ce qu’on atteigne le seuil auquel la peau va céder… libérant ainsi le précieux jus. Si on fait pareil lorsque la peau est fragile, on va directement extraire les jus les plus grossiers et beaucoup de couleur… Voilà pour le principe.
Comment savoir que la pression exercée est suffisante quand on n’est pas dans le pressoir ?
Ca, on peut le savoir en fonction de l’écoulement des jus. Si les jus s’écoulent "rapidement", c’est que le seuil est atteint… ensuite, pour conduire un pressoir, il faut augmenter la pression lorsque le débit des jus chute; ou maintenir la pression à sa valeur si le débit de jus est soutenu… car il faut extraire le jus ni trop vite ni trop lentement. C’est là toute la difficulté de la conduite du pressurage ! Difficle de juger de tout ça à l’oeil !
Heureusement le constructeur de notre pressoir a pensé à tout: pour connaître objectivement l’écoulement des jus, notre pressoir est doté d’un débimètre à sa sortie. En trois heures et demie – quatre heure, le jus est extrait en douceur des baies et le fractionnement est réussi. S’il fallait rester concentrer pendant 4 heures sur l’écoulement des jus pour commander manuellement son pressoir, ce serait bien difficile d’arriver à tenir 15 ou 20 heures de suite avec la même aciduité… la technologie – tout en adaptant le pressurage à la qualité du raisin – permet d’être plus réactif, plus précis et plus objectif que l’homme pour ce type de tâche .
Et après le pressurage ?
Les jus (moûts) sont décantés pendant une douzaine d’heures pour les débarrasser de la poussière ou des débris végétaux qui naissent lors du pressurage. C’est ce qu’on nomme le débourbage, une étape obligatoire en Champagne. Ensuite, les moûts sont acheminés dans les cuves de fermentation.
Les fermentations sont bien engagées. Le moût est en train de devenir vin. Il est difficile de déguster en cours de fermentation à cause du sucre résiduel et des arômes de levures plus ou moins prononcés selon qu’il s’agit de levures indigènes ou de levures sélectionées. Toutefois, à ce que j’ai pu sentir, ça se présente plutôt bien… mais ne nous précipitons pas. Laissons le vin se faire et nous jugerons du résultat dans quelques semaines.
Comme je le disais lors de mon précédent post, la maturité phénolique de 2006 est plus avancée que celle de 2005. Ceci nous a permis de tenter une vinification en rouge… on en reparlera plus tard.