Dernièrement, j’ai reçu un groupe d’une quinzaine de personnes qui voulaient découvrir notre domaine. Après leur avoir présenté notre parcours et notre projet d’accompagner une partie de notre vignoble sans traitement, une femme m’a dit « Vous devez avoir des nerfs d’acier ! ».
Je pense que c’est important de vous transmettre une clef pour ça:
Il faut des nerfs d’acier, je pense, quand on voit uniquement le côté négatif de ce qui peut se produire. Quand on se projette sur quelque chose de nouveau, où il y a un risque, la majeure partie des gens focalise sur ce qui pourrait arriver de pire.
Focaliser sur ce qui pourrait arriver de mieux, c’est justement le meilleur moyen de faire la part des choses entre ce qui est bien et ce qui est mal dans notre manière de concevoir les choses à l’instant présent; de s’aligner et d’être parfaitement en corrélation avec ça.
C’est à dire que quand je dis « Vue l’expérience qu’on a fait en 2015 dans la vigne non traitée, où des raisins de chardonnay avec zéro pulvérisation dessus étaient sains; alors que dans d’autres endroits sur le domaine, il y avait des raisins en biodynamie qui – malgré l’utilisation de soufre en poudrage ou en pulvérisation – ont décroché face à l’oïdium… je me dis qu’il y a une clef à saisir, qu’il y a quelque chose à comprendre et ça mérite qu’on aille plus loin.»
En 2016, c’est ok pour moi, c’est totalement cohérent et aligné que je continue ce type d’expérimentation pour aller de l’avant et pour comprendre. Donc j’ai envie de multiplier les essais sur 2 ou 3 parcelles. Je ne sais pas encore comment ça va se faire: le comment je le connais pas; mais je sais que c’est important pour moi.
Pourquoi c’est important pour moi ?
Si je me mets dans l’esprit des gens qui voient le côté risque, ils vont dire:
« Oui, mais on peut se moquer de toi ! »
« Oui, mais si tu te plantes, c’est que tu es un nul ! »
« Oui, mais… etc… etc. »
Sans compter l’aspect financier car si je perds quelques centaines ou quelques milliers de kilos de raisin, c’est quelques milliers de bouteilles que je ne vendrai jamais. Et effectivement, il y a un impact financier…
Le seul moyen d’équilibrer avec tous ces risques qui font que la majeure partie des gens, en focalisant sur tous ces risques, ne passent pas à l’action. Ils ne décident pas de faire quelque chose qui est mieux pour l’environnement, ou mieux pour la qualité de leur vin.
Ils vont chercher des raisons mentales qui vont justifier le fait qu’ils ne changent rien et qu’ils continuent à faire ce qu’ils faisaient par ce que leur émotion est trop vive à l’intérieur pour qu’ils puissent réussir à passer à l’action.
C’est une discussion que j’ai eu dernièrement avec un petit négociant dont j’avais une super image … le mec me dit :
« C’est quand même mieux si on utilise des pesticides, par ce que si, par ce que ça.. »
« C’est quand même mieux si on ne travail pas les sols, par ce que si, par ce que ça.. »
Je me disais c’est du pur délire ! Mais bon, ce n’est pas grave, je l’ai laissé dans son trip.
Ce qui m’intéresse, c’est de voir ce que JE peux faire !
Et donc, l’idée face à tous ces risques de perte de récolte, de routage de gueule et j’en passe, c’est de me demander quelle est la contre-partie ?
Imaginez si on trouve comment accompagner nos vignes avec zero pulvérisation tout le temps, quelle que soit l’année climatique ! Quels sont les bénéfices ?
1 Le vigneron est sécurisé: il a trouver une manière de cultiver sa vigne en ayant l’assurance que derrière il y aura un résultat sans se mettre à stresser dès qu’il commence à y avoir des risques de température élevée, ou des conditions climatiques qui peuvent favoriser tel ou tel champignon, tel ou tel nuisible, ou tel ou tel symptôme. Imaginez la tranquillité d’esprit pour le vigneron !
Un vigneron tranquille d’esprit… pour sa famille, ses proches, ses clients, ça change toute sa relation ! Ca change sa vie ! Et en plus ça lui permet de vivre longtemps car il est moins stressé. Donc il améliore sa durée de vie.
2. L’impact qui me touche au plus profond, c’est:
- d’une part, ça va permettre à l’être humain de comprendre en profondeur comment fonctionne un être vivant. Quel est le rôle, quelle est l’attitude que le vigneron doit avoir pour accompagner la nature ?
- et d’autre part, en débarrassant de toutes ces molécules, de toutes ces substances dont on dit qu’elles peuvent être nocives pour la santé ou l’environnement (qu’on soit en bio, en biodynamie ou en conventionnel, en lutte raisonnée, en Terra Vitis, en tout ce que vous voulez… dans tous les cas, il y a des substances qui s’utilisent qui sont soit avérées cancérigènes, mutagènes… et tout un tas de choses qu’on retrouve dans la nature, dans l’environnement, dans l’eau de pluie, même dans l’eau du robinet et dans le sang des gens) quel que soit le type de culture qu’on choisi.
Je me dis que par le passé, c’était possible de ne pas utiliser toutes ces substances : Dom Pérignon, quand il travaillait en Champagne, était capable (lui, et les autres !) de travailler la vigne sans avoir tout cet artifice qui maintient la vigne en état de survie. Car c’est juste pour maintenir la vigne en état de survie !
Quand j’entends quelqu’un qui me dit « Quand on travaille avec de la chimie, on n’a plus de maladie. ». Euh… le seul moyen de le savoir… Enfin, pour moi, avec la chimie, on masque la réalité. On maintient la vigne en état de survie parce que si on la soignait vraiment en utilisant des pesticides, ça ferait comme quand vous avez un rhum : vous traitez le ruhm et c’est terminé, vous n’avez plus besoin de le faire.
Si la chimie était vraiment le garant, si c’était un produit phyto-pharmaceutique… j’aime bien cette expression qui laisse penser que ça peut être bien… produit phyto-pharmaceutique, si vraiment il soignait la plante… quand elle déclanche une maladie, vous traitez une fois, deux fois, et hop c’est terminé ! Après, pendant 20 ans, vous êtes tranquille !!
Mais non, ce n’est pas ça la réalité ! La réalité c’est qu’on a créé une vraie dépendance à cette manière de faire auprès de vignerons… il se sentent sécurisés d’une fausse manière… car en réalité, tous les ans, ils se retrouvent dans l’insécurité. Même les années où climatiquement c’est difficile, même en bombardant de chimie, c’est dur pour eux de réussir à avoir une récolte saine (comme pour nous d’ailleurs).
Donc, il faut se poser les bonnes questions…
Pour moi, la maladie est le signe quelque chose dis-fonctionne. C’est ma croyance: Je suis persuadé que s’il y a une maladie, quelque chose dis-fonctionne; que ce soit dans le sol ou dans la plante. Alors je me demande « Comment je peux faire en sorte que tout fonctionne mieux ? ». Et c’est pour celà qu’on a créé cette nouvelle méthode: cette nouvelle approche de vivant, d’accompagnement du vivant, de compréhension du vivant et d’intégration de nouvelles consciences pour le mettre au service de ma vigne. Et ce qui est génial, c’est que dès le raisin, on arrive à percevoir qu’il y a une nette différence par rapport à la partie qui n’est pas accompagnée de cette manière… aussi bien sur le plan de la maladie que sur le plan gustatif.
Donc, je suis parfaitement aligné !
imaginez le gain pour l’humanité de trouver comment se passer de toutes ces substances, de gagner du temps, d’être en sécurité, de se sentir bien dans sa peau, et voilà ! J’ai fait le pour et le contre… du coup, je n’ai pas des nerfs d’acier ! Je me dis que ça vaut le coup de faire l’expérimentation. C’est un investissement !
De la même manière qu’on pourrait investir 5.000, 10.000, 100.000 euros pour quelquechose, mon investissement, c’est mon temps, ma conscience, c’est mon énergie, c’est ma présence, et c’est la forme de risque de perdre une partie de ma récolte. Voilà mon investissement; et le gain qu’il y a derrière est immense pour vous comme pour moi !
Je vous souhaite une bonne journée !
A bientôt !